Les actes violents survenus
récemment, leur médiatisation et leur ressassement peuvent amener dans notre
esprit beaucoup de troubles et susciter haine, désir de vengeance et angoisse. Il
est donc essentiel de protéger notre esprit de ces maux redoutables.
On pourrait s’indigner et se
dire : « Mais mon esprit fonctionne très bien ! C’est la
situation extérieure qu’il faut changer, rien de plus ! » A cela, deux
réponses peuvent être apportées. La première immédiatement
compréhensible : nous ne parvenons pas toujours à changer une situation
extérieure, par contre nous pouvons toujours transformer notre esprit. Et cela
est nécessaire car c’est toujours l’esprit qui fait l’expérience de la joie, du
bonheur ou, au contraire, de la souffrance.
L’autre réponse nous est fournie
par la loi de cause à effet : tout ce dont nous faisons l’expérience, à chaque
instant, est la conséquence de nos actes antérieurs. Si je veux donc faire
l’expérience de la joie, du bonheur et de la santé, je dois donc impérativement
renoncer aux actes négatifs inspirés par les émotions négatives (la haine, la
vengeance, la peur fondée sur l’ignorance…) et accomplir des actes inspirés par
l’amour universel et l’aspiration à libérer tous les êtres vivants de leurs
difficultés.
Maîtriser notre esprit est donc non
seulement nécessaire, mais c’est encore possible. Pour n’aborder que des
pratiques proprement laïques*, qui
ne nécessitent donc aucun engagement spirituel, le Yoga met à notre disposition
des pratiques puissantes et bénéfiques. Ainsi, Nadi shodana, nous permet
de purifier les canaux énergétiques. Par ailleurs, la méditation du calme
mental nous permet de développer la concentration et de desserrer le nœud
coulant que les émotions négatives enserrent autour de notre cou. Enfin, il
existe aussi une pratique pour purifier les souffles qui circulent à
l’intérieur des canaux subtils.
La circulation des souffles
subtils (Vayus) à l’intérieur des
canaux (nadis) est en relation
étroite avec le fonctionnement de notre esprit. Ils sont mêmes totalement
indissociables, tout comme le sont le cavalier (esprit) et sa monture
(souffle). Ainsi, en prenant pour support la respiration grossière, on va
harmoniser la circulation des souffles subtils dans les deux canaux principaux,
Ida et Pingala. Ce faisant, on régule le fonctionnement de notre esprit,
ce qui nous permet alors d’accomplir un grand nombre d’actes bénéfiques. Ces
derniers génèrent alors des expériences de joie, de bonheur et nous permettent
alors d’obtenir une excellente santé.
· Phase préalable : reconnaître la pleine valeur de cette méditation
La pratique de la purification
des souffles possède le double mérite d’être extrêmement simple et puissante.
Cette simplicité comporte
toutefois un risque : sous l’emprise de l’ignorance, notre esprit perturbé
peut ravaler cette précieuse pratique au rang de simple « truc », de
vulgaire « outil pour aller mieux ». On risque alors de pratiquer sans
réelle implication, sans ferveur véritable, et de délaisser rapidement cette
pratique, un peu comme un enfant qui se serait lassé d’un jouet.
Pour prendre pleinement la mesure
de cette méditation il faut en reconnaître pleinement les qualités.
Quant à son contenu, cette méditation
repose sur la stabilisation dans notre esprit d’états émotionnels vertueux. Une
inspiration élevée donnera nécessairement naissance à de grands bienfaits.
On sait, par ailleurs, qu’il ne
s’agit pas du dernier outil de développement à la mode qui disparaîtra aussi
rapidement qu’il est apparu. Cette pratique est très ancienne et de très
nombreux méditants l’ont mise en œuvre et en ont recueilli de grands
réalisations. En s’engageant dans cette pratique on suit donc un chemin extrêmement
bien balisé**.
Après avoir généré une grande
confiance dans l’exercice même, il s’agit maintenant de se convaincre de notre
aptitude à le mener pleinement à son terme. A ce titre, nous possédons toutes
les qualités requises : nous disposons d’un corps physique qui fonctionne, et
celui-ci est relié à un esprit. Par ailleurs, nous avons généré la motivation appropriée
: nous aspirons à nous délivrer de nos difficultés et à contribuer à
l’instauration d’une paix universelle. Donc toutes les conditions sont pleinement
remplies pour accomplir fructueusement cette pratique.
Grâce à cette analyse préalable
nous sommes parvenus à générer une confiance
raisonnée qui nous prémunit contre
deux écueils: l’adhésion aveugle et le scepticisme. Une adhésion spontanée, non
réfléchie, serait dépourvue de véritable fondement et donc se révélerait
extrêmement fragile et réversible : il suffirait d’entendre un avis
critique pour être déstabilisé et changer d’opinion. Inversement, un
scepticisme frileux ne ferait qu’amputer la pratique de ses bienfaits.
En ravivant à chaque fois ce
processus notre confiance acquerra force et stabilité nécessaires à la mise en œuvre
de la pratique.
· Principes de base
De quoi avons-nous besoin, au
plus profond de nous-même, pour vivre ? Cette question essentielle qui
oriente pourtant le cours de notre existence nous la perdons parfois de vue et
nous entrons alors dans une routine de la vie quotidienne. Les difficiles événements
récents nous incitent à faire se retour sur soi et à y répondre.
Nous avons fondamentalement besoin
d’amour et de pleine santé. Dans un contexte moins grave, exprimer une telle affirmation
pourrait paraître niais, mais pas en ce jour, pas au regard de ce qui s’est
passé.
L’amour, à l’opposé de la haine, de
la vengeance et de la peur. La pleine santé, la protection de la vie, celle des
autres et la sienne, à l’opposé de la mort que l’on donne aux autres et à
soi-même.
Maintenant que nous reconnaissons
clairement ce qui est le plus précieux, comment l’obtenir ? Cette méditation
nous l’enseigne.
L’univers entier est imprégné
d’énergie, de Prana. Et cette énergie
est particulièrement présente dans l’air. Nous allons donc pouvoir puiser à
l’extérieur cette énergie, l’absorber, l’emmagasiner à chaque inspiration.
Par ailleurs, la pensée chevauche
le souffle comme le cavalier chevauche sa monture : la conscience et le Prana
sont indissociables. Nous allons donc pouvoir associer une pensée bénéfique à notre
inspiration, pour donner pleine puissance à celle-là.
Et, ce que nous avons pris, à l’inspiration, nous allons ensuite
le transmettre autour de nous à chaque expiration. Car, contrairement à ce que
croit notre esprit dualiste, qui sépare arbitrairement « moi » et
« les autres », plus je donnerai et plus je recevrai.
Il suffit de pratiquer pour s’en
convaincre.
· Prendre et diffuser l’amour inconditionnel
Installé fermement, le dos bien
droit, à chaque inspiration, je puise un sentiment d’amour universel, inconditionnel,
et je laisse cette émotion me remplir complètement.
A chaque expiration je diffuse
cet amour autour de moi. Je souhaite alors que tous les êtres vivants soient
libérés de toutes leurs difficultés et fassent l’expérience d’un bonheur
durable. Je le souhaite vraiment de tout cœur. Dans un premier temps, je diffuse
cet amour dans un rayon d’action limité, quelques mètres, tout autour de moi.
Puis, j’élargirai progressivement le champ de mon action en veillant à n’exclure
aucun être vivant.
Parfois notre esprit se trouve
tellement perturbé qu’il ne nous est plus possible de générer spontanément ce
sentiment d’amour. Nous pouvons alors puiser dans notre mémoire. Peut-être avons-nous
vu un beau film où de nobles sentiments se trouvaient exprimés, et cela nous a ému.
Sans doute avons-nous déjà éprouvé un amour authentique pour un autre être
vivant. Cet événement a laissé une trace (vasana)
dans notre esprit et nous pouvons la faire resurgir, la régénérer.
Il est souhaitable de porter
cette émotion à incandescence. Bien sûr, au départ, ce ne sera sans doute qu’un
tison. Mais après quelques respirations cette braise sera devenue un foyer
puissant qui irradiera tout autour de nous, produisant des effets puissants.
Au bout d’une minute je sens que
la pratique agit en moi favorablement. En poursuivant, je me sens de mieux en
mieux et je parviens à stabiliser cet état d’humeur. Toute ma journée se trouve
ainsi modifiée. En m’entrainant régulièrement, je parviendrai à contrecarrer l’installation
d’états mentaux négatifs dans mon esprit.
Cette pratique s’avère
particulièrement utile dans un environnement troublé où l’esprit des personnes
est plus facilement en proie à l’inquiétude et aux errements. Aussi, en protégeant
par cette méditation notre esprit nous serons mieux à même d’aider les autres
êtres.
· Prendre et diffuser la pleine santé
Il est possible d’accomplir la
première pratique seule. Mais on peut aussi la compléter par la seconde.
Pourquoi un tel ordre ? Parce que l’amour constitue la base d’une
excellente santé.
Pour générer cet excellent état
de santé, il est possible de s’aider en visualisant des rayons de lumière. Ils entrent
en nous à l’inspiration et nous imaginons qu’ils nous soignent. A l’expiration,
nous visualisons que des rayons de lumière sortent de nos narines et se dirigent
vers les autres êtres pour les apaiser et les soigner complètement.
Il est possible d’enrichir cette
pratique en visualisant des rayons de lumière de couleurs différents qui
correspondent aux 5 éléments qui composent le monde matériel : Feu, Eau, Terre,
Air, Espace ***. En effet, selon la médecine traditionnelle, lorsque ces
éléments sont en harmonie dans le corps, alors la personne expérimente un état
d’excellente santé, tandis qu’un déséquilibre persistant conduit à l’apparition
d’une pathologie.
conclusion
Ainsi, les sombres événements récents nous éperonnent et nous
incitent à nous tourner vers la lumière pour la faire rayonner autour de nous.
La purification des souffles
exposée ci-dessus nous donne un moyen pour réaliser pleinement le potentiel que
chaque être vivant recèle en soi.
On veillera à ne pas pratiquer de façon distraite, ou routinière,
et on générera un grand enthousiasme, une réelle ferveur afin de recueillir
pleinement les bienfaits de cette pratique. Aussi, la phase préalable qui
consiste à faire mûrir l’esprit et à reconnaître l’importance de cette méditation est essentielle.
Dans une séance de Yoga cette purification
des souffles pourra harmonieusement prendre place après le nettoyage des
canaux (Nadi Shodana),
avant d’aborder la Salutation au Soleil
(Surya Namaskar)****.
Christian Ledain
professeur de Hatha Yoga, Maître initiateur de Reiki
professeur de Hatha Yoga, Maître initiateur de Reiki
NOTES
* Il existe, bien sûr, à côté de
ces pratiques laïques d’autres pratiques qui nécessitent la dévotion envers un
maître spirituel (Gourou), ainsi que le
respect de rituels intégrant la récitation de mantras, l’accomplissement de gestes codifiés (mudras), ainsi que des visualisations mentales nécessitant une
grande concentration. La nature et le contenu de ces pratiques varie alors
selon la voie spirituelle retenue par l’adepte du Yoga (hindouisme, bouddhisme
ou jaïnisme).
**La pratique ici décrite sert
d’ailleurs de base à un exercice de sophrologie très utilisé pour mener à bien
un projet personnel ou professionnel. Il consiste à se projeter mentalement
dans la réussite.
***Le corps physique, grossier (sthula sharira), est composé de 5 éléments (pancha bhuta) qui servent
à constituer tout phénomène matériel : Feu (tejas),
Eau (ap), Terre (prithvi), Air (vayu),
Espace (akasha). Les phénomènes
naturels que nous connaissons sous la désignation feu, eau, terre, air et
espace sont des agencements particuliers de ces différents éléments, selon des proportions
variables. Ainsi l’élément Eau composera de façon prépondérante tous les
liquides qui circulent dans le corps (sang, lymphe, urine). L’élément Terre
participera de façon prioritaire à constitution de tout ce qui structure,
charpente le corps humain et en assure la solidité : les os, les vertèbres, les
cartilages, les réseaux nerveux et sanguins. L’élément Vent sera
majoritairement présent dans tout ce qui est gazeux à l’intérieur du corps et
sera présent dans les poumons et les intestins. L’élément Feu se manifestera
tout spécialement dans la production de la chaleur corporelle et dans le feu
digestif. Enfin, l’Espace est enfin présent est omniprésent dans le corps et
permet à toutes les phénomènes de se manifester. (cf. Hatha-Yoga-Pradipika, introduction de Tara Michael, p71).
**** Voir nos articles concernant ces deux pratiques
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