Evacuer les états négatifs et générer les états positifs

Représentation simplifiée des 3 canaux principaux

Les êtres humains sont des êtres vivants. Ils disposent d’un corps matériel que l’on peut percevoir par l’usage de nos cinq sens. Mais il existe aussi un corps subtil, invisible, qui conduit l’énergie que nous mobilisons à chaque instant.
1. Les principaux canaux

 Cette énergie circule à l’intérieur de ce corps subtil en empruntant tout un réseau de canaux, appelés nadis, en sanskrit. Parmi les 84 000 canaux qui composent notre corps subtil, trois sont fondamentaux et font l’objet d’une attention particulière de la part des Yogis: le canal central, le canal de droite et le canal de gauche. Ces trois canaux prennent naissance au niveau du centre de la base (muladhara chakra).
Le canal central, appelé Sushumna en sanskrit, s’élève à l’intérieur de la colonne vertébrale et traverse le cerveau. Son diamètre est approximativement de la largeur d’un pouce. Il n'a pas le même diamètre sur toute sa longueur : elle est constante dans la région qui s'étend du périnée au chakra du cœur, puis s'évase légèrement à partir de ce centre jusqu'au sommet du crâne, un peu comme le pavillon d'une trompette. 

Les deux canaux latéraux, Ida et Pingala, longent la colonne vertébrale, à 3 centimètres à droite et à gauche de celle-ci. Leur diamètre est sensiblement plus petit que celui du canal central puisqu’ils ont la largeur d’un auriculaire. Arrivés au niveau de la tête, ces deux canaux remontent jusqu’à la voûte crânienne. Là, ils bifurquent et redescendent, passent derrière les yeux pour aboutir aux narines : le canal qui longe la colonne vertébrale sur sa droite aboutit à la narine droite et celui qui longe la colonne sur sa gauche parvient à la narine gauche.

Afin de purifier ces canaux, il est utile de les visualiser. Cette représentation mentale sert aussi de support de concentration.


Représentation détaillée des 3 canaux principaux

2. La purification des canaux

Quand nous inspirons, non seulement nous inhalons l’air qui pénètre dans nos poumons, mais nous absorbons aussi de l’énergie, du Prana. Ce Prana, emprunte les canaux subtils ida et Pingala. Il nous est possible de purifier ces canaux par des pratiques du Yoga, notamment Nadi Shodana, (les respirations alternées) que nous avons déjà décrite. En inspirant consciemment par telle narine, on purifie le canal qui lui est relié.

3. Réguler les états mentaux

31. Premier cycle

Il est possible d’aller plus avant dans la pratique afin de mieux réguler les états mentaux.

En utilisant la main droite, obturez la narine droite avec le pouce et inspirez par la narine gauche. Visualisez une lumière verte qui entre par la narine gauche. Elle descend jusqu’au niveau du chakra de la base. Pensez que cette lumière est curative, croyez, de tout cœur, qu’elle vous soigne en profondeur.

Fermez la narine gauche, expirez par la narine droite et visualisez un air bleu pâle qui remonte par le canal de droite. Imaginez et ressentez alors que tous les erreurs, les difficultés liées au passé sont évacuées par la narine droite.

Effectuez trois respirations en tout.

 32. Deuxième cycle

Puis, changer de main : avec la main gauche, fermez la narine gauche avec le pouce et inspirez à droite. Visualisez  un air de couleur verte qui pénètre par le la narine droite et pensez profondément que cette lumière vous soigne. Expirez à gauche en visualisant un air rose pâle qui remonte par le canal de gauche. Imaginez alors et ressentez que tous les obstacles et les difficultés liés au futur sont évacués, dissipés.

Effectuez trois respirations en tout

33. Troisième cycle

Maintenant, les mains placées sur les genoux, respirez par les deux narines. .

A l’inspiration, visualisez une lumière verte bienfaisante qui entre par les deux narines et descend par les deux canaux latéraux jusqu’à la base de la colonne vertébrale.

A l’expiration, visualisez un air de couleur noirâtre qui s’élève par le canal central et s’échappe par le sommet du crâne.

Imaginez et ressentez que tous les obstacles et difficultés liés au présent sont évacués par le sommet du crâne.

Grâce à cette pratique, la concentration se développe et l’esprit devient plus calme. Mais aussi les éléments qui forment notre corps sont équilibrés. Nous purifions notre esprit des états mentaux négatifs et nous prenons plus facilement contact avec les états mentaux qui sont source de bonheur.

Effectuée avant de dormir, cette pratique influencera positivement le temps de sommeil qui sera plus paisible et réparateur. Réalisée au lever, cette pratique permettra d'avoir plus de distance vis à vis des événements extérieurs, de modifier ainsi notre comportement, et de transformer ainsi notre personnalité.

Christian Ledain
  

Pratique préparatoire et essence du Yoga



Quand on veut s’engager dans une séance de Yoga il est indispensable d’effectuer certaines pratiques préparatoires afin que la séance soit pleinement profitable. Car les techniques du Yoga sont tellement puissantes que, sans précaution préalable, on ne ferait que cultiver les problèmes dont on espère s’alléger, un peu comme un jardinier maladroit qui cultiverait beaucoup de chiendent parce qu’il n’a pas pris soin d’ôter les mauvaises herbes qui encombrent son jardin et d’en planter de bonnes !

Avant de couper cours au fonctionnement ordinaire de l’esprit, il est nécessaire d’adopter une certaine attitude corporelle.

1.       Placer le corps

Pour pouvoir réguler l’activité de l’esprit, il est nécessaire que le corps adopte une certaine position. Tout le monde en réalise aisément l’expérience : il est très difficile de réguler l’activité mentale quand on est allongé dans son lit, ou bien affalé sur un divan. Malgré notre volonté d’orienter l’esprit de façon constructive on finit vite par ressasser les mêmes antiennes.

Il est donc indispensable d’adopter une attitude propice à la concentration. Il en existe plusieurs dont la plus accessible est sukkasana (la posture confortable, en tailleur). Bien sûr, les personnes qui s’y sentent à l’aise pourront adopter padmasana (le lotus), siddhasana (posture parfaite), ou encore vajrasana (posture de la foudre, assis sur les talons). Enfin, si vos articulations regimbent, vous pourrez tout simplement vous s’asseoir sur un siège, le dos bien droit.

Il est maintenant possible de réguler l’activité de l’esprit.

2.       Réguler l’esprit

Il est indispensable, pour être heureux, d’apprendre à maitriser l’esprit car si on fait dépendre notre bonheur de circonstances extérieures, telles que la météo, le sourire de la voisine ou encore la baisse de la pression fiscale, on risque d’avoir souvent l’humeur chagrine ! Il faut donc apprendre à maitriser l’esprit, ce qui implique de savoir non seulement mettre à distance les émotions négatives, mais encore de développer le calme intérieur.

21. Générer les émotions bénéfiques

Nous arrivons au cours de Yoga accompagné du tumulte de toute notre journée. Dans les heures qui ont précédé, nous avons sans doute été énervés par ceci, contrariés par cela, stressés par autre chose encore…. Et notre esprit qui a trempé dans ce bain d’émotions négatives en est tout imprégné, tout comme le foulard blanc qui a longtemps baigné dans une teinture écarlate en ressort rougi.

Nous n’avons pas toujours conscience de la prégnance de ces émotions négatives qui constituent le bruit de fond de notre société. Il est donc nécessaire de purifier notre esprit de ces poisons. Et ceci n’est pas très difficile : nous allons simplement lui donner une orientation nouvelle, tout comme l’ingénieur détourne un fleuve de son cours naturel afin d’aller irriguer une pleine fertile.

Je vais ainsi raviver dans mon esprit la motivation excellente qui me pousse vers la pratique du Yoga. Même s’il s’agit de mon premier cours, je suis animé d’une espérance : dépasser certaines difficultés et me sentir mieux avec moi-même. Et si j’ai déjà participé à un cours, j’en ai ressenti quelques bienfaits sur lesquels je peux maintenant prendre appui et souhaiter qu’ils s’accroissent et s’approfondissent.

Je me remémore ensuite que le Yoga n’agit pas que sur moi. Ainsi, après une séance, je constate que je suis un peu plus ouvert, bienveillant et patient à l’égard des personnes que je rencontre. Je pratique ainsi non seulement pour moi, mais aussi pour tous les autres êtres. Je peux alors souhaiter que moi-même et tous les êtres vivants soyons délivrés de toutes les difficultés auxquelles nous sommes confrontés. Et cette aspiration large décuple la force de ma motivation.

Quelque chose opère alors mystérieusement en moi : ce qui n’était au départ qu’une idée descend de mon esprit vers mon cœur pour y devenir une émotion. Et, de même que le goût d’une madeleine trempée dans du thé avait fait ressurgir dans l’esprit de Marcel Proust le monde disparu de Combray, la seule évocation des états que je souhaite expérimenter me met aussitôt en contact avec eux et me permet de me sentir instantanément mieux.

Je donne alors pleinement sa place à cette émotion. Je la laisse m’envahir, je l’attise tout comme on souffle sur une braise pour que s’embrase un grand feu.

Maintenant que la joie, la détente et le bonheur m’animent et rayonnent en moi et autour de moi, je peux alors stabiliser mon esprit.

22. Développer le calme intérieur

Apprendre à stabiliser l’esprit est une nécessité car, sans discipline, notre courant de pensées est semblable à la flamme d’une bougie qui vacille au moindre courant d’air. Et on ne s’en rend même pas compte ! Tant qu’on n’a pas tenté une fois de poser notre esprit, on ne perçoit même pas à quel point celui-ci tremble. Et il faut alors beaucoup de courage et d’honnêteté pour reconnaitre qu’on n’est pas même libre chez soi, dans sa propre tête ! Une fois cette prise de conscience brutale effectuée il faut ne pas se laisser décourager et mettre en œuvre patiemment une pratique qui a fait constamment ses preuves depuis quelques millénaires.

Pour apaiser notre esprit, nous effectuons une courte méditation dite du calme mental, Shamata en sanskrit. De façon très simple, nous plaçons notre esprit sur un support et nous le laissons y reposer, tout comme un oiseau se pose sur une branche et y demeure paisiblement. Nous pourrions adopter comme support de concentration la flamme d’une bougie, mais il nous faudrait disposer non seulement d’une bougie, mais encore d’allumettes, ainsi que d’un lieu dépourvu du moindre courant d’air….Nous choisirons donc, par simplicité, un support universellement partagé et constamment disponible : notre souffle.

Il s’agit de prendre pleinement conscience du passage de l’air : quand l’inspiration se déclenche, je perçois son apparition, puis de son déploiement et, enfin, son extinction. Puis l’expiration se présente, s’élargit, puis disparait à son tour, et ainsi de suite.

C’est donc étonnamment facile à comprendre, même si c’est plus difficile à réaliser car il nous faut nous abstenir de bondir sur toute pensée qui se fraye un chemin dans notre esprit. Or, nous sommes tellement habitués à nous ruer sur ces pensées qu’il va nous falloir beaucoup de détermination et de vigilance pour accepter une telle frustration. Ce qui peut nous aider, c’est de nous identifier à ce petit poisson intelligent qui parvient à distinguer l’hameçon accroché à l’appât et qui s’abstient de se jeter sur lui !

Incessamment, nous laissons les pensées se dissoudre. Quand l’une d’elles apparait, nous l’identifions et nous la laissons passer. Là encore cette attitude intérieure n’est pas totalement nouvelle pour nous. Nous procédons déjà ainsi avec les nuages. C’est bien rare, en effet, qu’on cherche à les retenir, ou qu’on maugrée après le ciel pour les chasser ! Faisons donc de même avec nos pensées. Et, dès lors, elles se tarissent.

Selon nos capacités on effectuera cette pratique durant deux ou trois minutes. Et puis, quand on y prendra goût, on pourra allonger éventuellement la durée de cet exercice.

Grâce à cette pratique non seulement l’esprit devient plus calme, plus posé, mais aussi l’énergie dont nous disposons pour nos activités quotidiennes se développe de façon considérable. Nulle magie à cela : en permettant à notre esprit d’être au repos, nous cessons de gaspiller les ressources que nous dilapidions par une vaine agitation mentale. Nous effectuons ainsi de considérables économies d’énergie intérieure, ce qui nous permet de réaliser des projets de vie qui n’étaient autrefois pas même envisageables.

Nous avons donc laissé notre esprit se décanter, ce qui est excellent. Pour entrer plus profondément dans la pratique, il convient maintenant d’agir sur la respiration.

3.       Réguler le souffle

Quand je n’y prête pas attention je ventile peu mes poumons ; du coup, je vivote. Il est donc nécessaire que j’installe la respiration correcte, en trois parties, que nous enseignent les Yogis. Elle s’enchaine aisément : à l’inspiration mon abdomen se gonfle comme une chambre à air, puis mes cotes s’écartent, et enfin mes épaules se soulèvent. Je laisse ainsi mes alvéoles pulmonaires se déployer complètement. Une fois cette respiration installée, je la stabilise afin qu’elle demeure et m’accompagne instant après instant. Progressivement, je me sens mieux. Et je peux, pour soutenir mon attention, me remémorer qu’à chaque inspiration mon organisme absorbe non seulement l’oxygène, mais aussi l’énergie présente dans l’air que j’inhale.

Quand ce sera possible, j’installerai le maintien de la sangle abdominale.

Comme rien ne justifie que je ne respire correctement qu’à l’occasion de mon cours hebdomadaire de Yoga, soit 1/168° de mon temps, je n’hésite pas à m’entrainer un peu, chaque jour, afin d’approfondir les bienfaits qui découlent de cette respiration juste.

4.       Purifier les canaux

Grâce à la pratique du Yoga je développe mon énergie. Toutefois si les canaux par lesquels circule cette énergie n’étaient pas purifiés, cela serait de peu d’utilité. C’est comme si j’achetais une chaudière très performante. Si les tuyaux qui conduisent la chaleur dans les pièces sont encrassés, la maison demeurera froide. Par contre, si je procède régulièrement au nettoyage de ces conduits, même avec une modeste chaudière, toutes les chambres de la maison recevront une douce chaleur.

En purifiant ces canaux énergétiques, appelés nadis en sanskrit, je crée les conditions favorables pour stabiliser mon esprit, mettre à distance les émotions qui empoisonnent ma vie et faire plus facilement l’expérience des émotions bénéfiques.

Il me faut donc très régulièrement nettoyer ces conduits, si possible quotidiennement, pour être en excellente santé.

Le nettoyage s’effectue très facilement grâce à Nadi Shodana, la purification des canaux subtils.

Je pose l’index et le majeur de la main droite au milieu de mon front, et j’obture la narine droite avec le pouce pour inspirer à gauche. Quand mes poumons sont pleins, je ferme à gauche avec l’annulaire et j’expire à droite. Quand mes poumons sont complètement vidés, j’inspire à droite. Enfin, je ferme à droite avec le pouce et j’expire à gauche. Puis, on passe au deuxième cycle qui se déroule de la même façon. Trois, cinq ou 7 cycles seront excellents.

Il est très important d’être extrêmement concentré durant la pratique.

Il m’est possible d’enrichir cette pratique pour la rendre plus puissante. Je vais ainsi imaginer que mes canaux sont parfaitement purs. Je peux ainsi visualiser le canal de gauche, qui relie la pointe du coccyx à la narine gauche, et le canal de droite, qui relie la pointe du coccyx à la narine droite, clairs comme du cristal, translucides. Quand j’inspire à gauche, je peux visualiser le souffle qui descend par le canal de gauche jusqu’à la pointe du coccyx. Quand je ferme à gauche et que j’expire à droite, je peux visualiser le souffle subtil qui remonte par le canal de droite. Puis j’inspire à droite et je vois l’énergie descendre par le canal de droite. Alors j’expire à gauche et je vois l’énergie monter par le canal de gauche. Et ainsi de suite.

Mon esprit logique peut être heurté par une apparente contradiction : j’imagine que mes canaux sont purifiés au moment même où j’effectue cette pratique, alors que c’est précisément le résultat que j’espère atteindre par la mise en œuvre de cette technique !

En réalité, c’est le propre des disciplines tantriques, dont le Hatha Yoga fait partie, d’imaginer que le résultat poursuivi se trouve déjà atteint : je suis déjà parvenu au terme de mon voyage alors même que je m’engage à peine sur le chemin. Selon le tantrisme il n’y a en fait rien à conquérir à l’extérieur, rien à aller chercher d’autre qui ne se trouve déjà là. Et l’essence de la pratique consiste précisément à reconnaitre ce qui se trouve ici, de tout temps : réaliser la nature véritable des phénomènes que mon esprit obscurci ne parvient pas à percevoir. Par nature, les canaux énergétiques sont donc parfaitement purs et, grâce au Yoga, je me contente seulement d’ôter les voiles qui m’empêchaient de le réaliser pleinement.

5.       L’essence de la pratique

Dès lors, le déroulement de ma séance de Yoga ne sera que le prolongement et l’approfondissement des pratiques que je viens de mettre en œuvre. A chaque instant, je veillerai à ce que mon corps soit placé de façon juste. J’insiste bien : à chaque instant, et pas seulement lorsque je serai dans la phase statique de chaque posture. A chaque instant, ma respiration sera régulée, ample, correcte. A chaque instant, je stabiliserai mon esprit car le calme mental n’est pas une prime que nous octroierait, de surcroit, la pratique : le calme intérieur découle logiquement de différentes causes et conditions, parmi lesquelles figurent l’écoute constante de soi et la dissolution des pensées.

Ainsi ces pratiques préparatoires constituent bien l’essence même du Hatha Yoga.

Je pourrai donc avec grand profit conduire ces exercices chaque jour et passer ensuite à mes activités quotidiennes qui s’en trouveront grandement favorisées, fertilisées. Et si mes capacités et mon emploi du temps me le permettent, je pourrai même les mettre en œuvre le matin, ainsi que le soir, juste avant de me coucher : ceci rendra mon sommeil non seulement plus paisible, mais encore cela transformera ce moment de repos en temps d’approfondissement de la pratique.

Avec un peu d’entrainement, 5 à 6 minutes seront nécessaires pour conduire cette pratique dans son intégralité. Bien sûr, rien ne s’opposera à ce que je pratique plus longtemps.

Christian Ledain
 

Shalabhasana et Ardha-Shalabhasana


La vie constitue notre bien le plus précieux. Et si notre santé vient à être compromise nous sommes bientôt prêts à renoncer à nos possessions matérielles, notre statut ou à notre pouvoir. Cette vie est précieuse par nature, même si elle ne se suffit pas à elle-même. Sans elle il ne nous serait pas possible d’accomplir toutes les actions méritoires qui lui donnent son sel. Cette vie doit donc être constamment protégée, soutenue, préservée.

Le Hatha Yoga constitue un savoir irremplaçable, jamais égalé, pour entretenir et fortifier notre existence. En cela c'est un trésor incomparable qui nous aide au quotidien.

Parmi les innombrables postures que compte le Yoga, il en est une, merveilleuse, Shalabhasana, qui constitue un remède souverain à nombre des maux physiques et mentaux qui nous affligent, nous Occidentaux : le stress, l’anxiété, la sédentarité, le mal de dos. L’esprit de compétition et la quête constante de la rapidité nous éloignent à chaque instant un peu plus de nous-même. Cependant, faute de pouvoir changer le système dans lequel nous baignons, il nous est possible de prendre soin de nous en rétablissant constamment l’équilibre et l’harmonie dans notre corps et notre esprit, grâce au Yoga.

Pour profiter pleinement des bienfaits de Shalabhasana il est nécessaire de l’étudier en détail, d’en décrire la technique, mais aussi d’en préciser les nombreuses vertus. De cette façon, on ne passera pas notre chemin en méconnaissant l’existence de ce joyau. Nous pourrons ainsi pratiquer le cœur empli de reconnaissance envers ces Rishis, ces sages ancestraux qui, en méditation profonde, ont pu percevoir le Yoga et nous le transmettre pour nous aider à vivre mieux.

1.       REVENIR A L’ESPRIT DE LA DISCIPLINE
La posture, bien comprise, ne comporte absolument aucune difficulté matérielle, ni même aucun danger. Elle est accessible à tout le monde : enfants, adultes, personnes âgées, minces ou en surcharge pondérale…. Bien sûr, comme pour toute posture, il y a moyen de rendre l’approche plus ou moins audacieuse : selon nos capacités et de nos besoins, on adoptera telle ou telle variante impliquant un engagement physique plus ou moins intense. Mais l’essentiel n’est pas là, dans cette recherche de la difficulté technique. Bien au contraire !

Shalabhasana, comme tout exercice de Hatha Yoga, pourrait devenir redoutablement dangereux si on l’abordait avec un état d’esprit erroné. De même qu’il serait déraisonnable de tirer les moustaches d’un tigre endormi, il serait tout aussi fou d’aborder Shalabhasana l’esprit empreint de conceptions fausses. Quelles sont ces idées erronées dont il convient de purger notre esprit ? Précisément, celles qui imprègnent notre société moderne : la quête de la performance, la maximisation du profit, l’esprit de compétition. Appliquée à Shalabhasana, une telle déviance conduirait à chercher à monter les jambes le plus haut possible, à tout prix, l’esprit tendu vers ce résultat. Or, si les règles de gestion économique ont pleinement fait leur preuve auprès des entreprises, elles deviennent catastrophiques dans la relation avec soi-même : notre vie n’est pas un business !

Voilà pourquoi il est indispensable avant toute séance de Yoga d’effectuer un bref retour vers soi. Il n’est pas possible de pratiquer correctement sans passer par ce sas de décontamination où l’esprit renonce à son mode de fonctionnement ordinaire, conditionné. On va ainsi prendre quelques instants pour se remémorer la motivation juste, pacifique, positive qui nous inspire. On va se souvenir qu’on pratique pour développer nos capacités physiques, intellectuelles, morales et spirituelles ; pour devenir, en fin de compte, un être humain totalement épanoui.

Une fois que cet état d’esprit ravivé et stabilisé, il sous-tend alors chaque instant de notre pratique. Dès lors, tout ce qui est accompli, la plus petite chose, devient alors juste et bénéfique. C’est cette attitude intérieure correcte qui fait vraiment le niveau d’un pratiquant et non sa souplesse, sa musculature ou le nombre d’années qu’il a passé à transpirer sur le tapis !

Maintenant que vous avez pleinement en tête l’importance toute relative de la technique, il est possible de l’aborder tranquillement.

On décrira tout d’abord Ardha-Shalabhasana, la demi-sauterelle avant d’examiner Shalabhasana, la sauterelle complète.

2.       ARDHA SHALABHASANA

·         Attitude de départ
On commence par s’allonger à plat ventre, les bras tendus le long du corps, les paumes en contact avec le tapis. Le front repose tout d’abord au sol afin de bien dégager les filets nerveux de la région cervicale.
Puis, on fléchit les bras. L’importance de la mobilisation des bras est à ce point déterminante que le nom de la posture attire notre attention sur elle. Comme on le sait, Shalabhasana désigne, en sanscrit, la sauterelle. Cet animal possède des pattes arrière tellement puissantes qu’elles lui permettent de soulever son corps et de décoller ainsi du sol. Nous n’allons certes pas effectuer des bonds dans la salle, mais retenons cette idée essentielle : l’appui sur les mains doit être tel qu’il permette de transférer au maximum le centre de gravité du corps vers le haut, c’est-à-dire vers les épaules. La mobilisation des membres supérieurs est donc essentielle pour permettre le soulèvement des membres inférieurs.

Pour que l’appui des mains permettre de produire un effet de levier maximal, il importe qu’elles soient très précisément placées c’est-à-dire ni trop avancées, ni excessivement maintenues en arrière. L’expérience et l’entrainement répété montrent que le placement optimal se situe dans la région du bassin. Le dessin figurant ci-dessous fait apparaitre un placement incorrect des mains : l’appui pris sur elles ne favorise aucunement le soulèvement des jambes.


Les coudes sont trop fléchis - l'appui sur les mains insuffisant -les jambes ne peuvent pleinement se soulever







Les coudes fléchis, on essaye de garder les épaules plaquées au sol. Toutefois, compte tenu du volume de la poitrine et de la sensation douloureuse qui pourrait résulter de sa compression au sol, les femmes veilleront à modérer leur effort. Quant aux hommes, pour lesquels cette difficulté ne se présente pas, ils veilleront scrupuleusement à conserver les épaules sur le tapis.

On rejette alors les deux épaules en arrière afin d’amener une forte contraction musculaire entre les omoplates.

On place enfin le menton au sol, ce qui incurve la région cervicale et contracte la musculature de cette zone.

Tout ceci constitue le placement préparatoire.


 ·         Entrer dans la posture
Ardha Shalabhasana - la demie Sauterelle
Pour entrer dans Ardha Shalabhasana, on soulève alors la jambe gauche du sol. Cette jambe doit être décollée, mais pas trop, pour permettre une mobilisation musculaire intense, sans être toutefois cause d’un épuisement prématuré. Cette jambe gauche est tendue. On s’abstiendra donc impérativement de la fléchir, ce qui demanderait, certes, moins d’efforts, mais réduirait considérablement les effets bénéfiques de la posture.

La jambe droite repose passivement au sol. Il importe donc de ne prendre aucun appui sur elle. On est pourtant redoutablement tenté de le faire en raison de notre conditionnement mental : esprit de compétition, souci de performance, croyance en la formule : «  plus c’est dur, plus ça doit être efficace ! ». Il nous faut donc être très vigilant pour ne pas céder à cette tentation.

Pour être certain de ne pas « tricher » on vérifiera que l’os du bassin demeure constamment plaqué au sol. En empêchant ainsi la crête iliaque gauche de décoller du tapis, on empêche le bassin de pivoter.

Parfois, certaines personnes décollent le pied droit de quelques centimètres du sol, tout en gardant la jambe tendue. Ceci est regrettable car on perd alors tout contraste de sensation entre la partie gauche, contractée, et la région droite, relâchée.

On demeure ensuite immobile et cette période constitue la phase statique de la posture. L’esprit se concentre alors sur la différence des sensations recueillies entre les parties droite et gauche du corps. Ce balayage s’effectue consciencieusement, en remontant lentement du bas vers le haut du corps : on passe ainsi en revue les muscles des mollets, des cuisses, puis des fessiers et de la région lombaire. Cet état des lieux attentif coupe court à la rumination des pensées ordinaires et permet ainsi de stabiliser l’esprit. Cette investigation permet aussi de mieux intégrer notre schéma corporel, c’est-à-dire la façon dont notre corps physique est constitué. Comme l’effort est modéré, l’esprit peut demeurer constamment sans tension, paisible. Le niveau de concentration peut encore être approfondi : on perçoit, et on intègre, l’évolution constante des sensations, la modification ininterrompue de tous les phénomènes.  

Garder une minute la posture de ce côté est excellent.

A chaque instant la respiration demeure normale, ample, régulée. Nous reviendrons sur l’importance déterminante de cette respiration qui conditionne l’obtention de nombreux bienfaits dans cette posture.

On repose ensuite la jambe au sol et on savoure la détente. Puis on procédera de façon symétrique en soulevant la jambe droite, et en laissant la jambe gauche reposer au sol, totalement détendue.

Ardha Shalabhasana produit des effets très proches de ceux de la posture complète. Cependant, comme la mobilisation musculaire y est particulièrement douce, l’adoption d’Ardha Shalabhasana permet de bien stabiliser l’esprit et de préparer les muscles au travail plus intense qui sera accompli dans la posture complète. La demi-posture est donc une pratique qu’il est recommandé d’effectuer avant de passer à Shalabhasana. Cependant, des pratiquants avancés pourront se dispenser d’elle.

3.       SHALABHASANA

·         La posture de base
La position de départ est exactement la même que pour Ardha Shalabhasana. Nous rappellerons toutefois un élément clef : les mains doivent être placées de telle façon que l’appui pris sur elles permette le transfert du centre de gravité du corps vers les épaules. Grâce à l’effort intense qui se trouve ainsi déployé, la poitrine et le menton se trouvent plaqués très vigoureusement au sol, à tel point qu’il devient alors impossible de décoller le menton du tapis.
Shalabhasana - posture complète

Ainsi installé, la musculature de l’arrière du corps se trouve vigoureusement contractée sur toute sa longueur, c’est-à-dire depuis la région cervicale jusqu’aux mollets, en passant par les omoplates, la région lombaire, les fessiers et l’arrière des cuisses.

Une fois le corps immobilisé, cette phase statique peut être utilement conservée une à deux minutes, selon les possibilités de chacun.

Bien sûr, plus les jambes seront soulevées et plus la musculature sera mise intensément à contribution, ce qui sera très fatigant. Mais, certaines personnes ont besoin d’un engagement physique très intense. On cherchera ainsi à dégager un compromis tel que la posture puisse être conservée totalement immobile suffisamment longtemps, tout en suscitant une contraction musculaire suffisamment puissante. Une grande liberté est donc laissée à chaque pratiquant pour lui permettre de moduler la posture à loisir.

On proscrira toute attitude violente consistant à vouloir monter les jambes le plus haut possible et le plus vite possible. On n’en recueillerait que des déconvenues. Plutôt qu’une attitude grossière et brutale, on préconisera une mobilisation consciente et progressive des différentes chaines musculaires de l’arrière du corps. Une telle approche paisible durant la phase dynamique permettra d’accentuer la stabilité de l’esprit durant toute la phase statique.

Enfin, quand on décidera de redescendre, on le fera sans à-coup, sans précipitation, en évitant tout écroulement physique ou mental. Une fois allongé on goutera le confort du repos , tout en gardant l’esprit attentif à tout ce qui continue d’évoluer, de se transformer en nous.
Variante avancée à laquelle il faudra peut être renoncer !

·         Les aménagements possibles
Nous avons décrit la posture traditionnelle, orthodoxe, l’attitude dont il est souhaitable de se rapprocher le plus possible. Cependant, compte tenu de nos capacités individuelles et de nos limitations propres, il est possible, dans certaines circonstances, d’apporter quelques aménagements à la référence classique. Bien sûr, ils atténueront les bienfaits de la posture, mais ce sera à la marge, sans en trahir les principes fondamentaux. Il ne s’agit donc pas d’être laxiste, et d’accepter des compromissions honteuses, mais simplement, dans un esprit universaliste, d’ouvrir au plus grand nombre l’accès à cette posture qui constitue un des piliers du Hatha Yoga.

·         En cas de lumbago ou de sciatique
Il est possible d’adopter Shalabhasana en cas de lumbago, voire de sciatique, ce que j’ai eu à faire il y a quelques années, pour mon plus grand bien, après un déplacement cahoteux dans le Sahara, à bord d’un car aux amortisseurs moribonds. C’est sans doute déroutant de recommander l’usage d’une telle posture dans ces conditions car on serait, de prime abord, précisément tenté de l’exclure absolument pour recouvrer la santé.

Bien sûr, si la variante aménagée qui vous est proposée ici n’est pas respectée scrupuleusement, on ne manquera pas d’aggraver le problème au lieu de le régler. Mais, ceci constitue la limite à laquelle on ne peut, hélas !, que se heurter : on ne peut pas faire grand-chose pour aider les personnes qui n’ont pas renoncé à la violence envers elles-mêmes : toute pratique susceptible de les soulager sera immanquablement tordue et retournée contre soi-même pour se blesser. Il n’est alors possible que de leur enjoindre, du fond du cœur, d’apprendre à se respecter et, peut-être, pour cela, d’aller consulter un psychologue avant de revenir paisiblement vers le Yoga.

Comment donc procéder avec Shalabhasana en cas de douleur lombaire? C’est lumineusement simple : on va faire comme si on voulait décoller les jambes, mais on va s’empêcher absolument de les soulever. A quoi bon alors recourir à cette posture, si c’est pour ne pas bouger ? Cela sert à mobiliser les muscles de l’arrière du corps, à les contracter pour qu’ils s’étoffent et que tout le dos soit ainsi protégé.

On est donc allongé à plat ventre, les bras placés le long du corps, tout l’arrière du corps tendu, roide. Vous avez déjà vu un chat à l’affut, fixant de l’œil un pigeon : son corps est à l’arrêt, pas même un poil ne bouge, tandis que tous les muscles de son corps sont mobilisés. On va donc imiter ce félin en adoptant Shalabhasana : totalement immobile, à plat ventre, sans aucun mouvement pour ne pas malmener le disque intervertébral qui a été endommagé, on demeure avec les fessiers et le dos contractés. D’ailleurs, quand on effectue ce travail, on sent que cela nous soulage. Et il n’y a rien d’étonnant à cela : le lumbago, la sciatique sont apparus suite à un mauvais mouvement, une torsion du tronc combinée à une flexion vers l’avant de la colonne. Mais ce mauvais mouvement n’aurait pu produire cette lésion du disque intervertébral si le dos avait été suffisamment musclé.

En prenant donc Shalabhasana aménagé, on va fortifier le dos et donc améliorer un des facteurs à l’origine de notre mal de dos.

Quand la douleur aura disparu il faudra se souvenir que les mêmes causes produiront inévitablement les mêmes effets et que, par conséquent, ce lumbago ne tardera pas à réapparaitre si le dos s’affaiblit de nouveau. Il conviendra alors d’adopter une variante douce de Shalabhasana, et cela durant toute la vie, à raison d’une à deux fois par semaine, pendant une quinzaine de minutes en tout. Ceci parait bien contraignant, mais quand on a bien souffert, qu’on est même resté paralysé quelque temps par la douleur et qu’on a éprouvé cet état misérable, on consent d’assez bon cœur à la discipline recommandée. Puisse mon expérience être utile à d’autres !

Pour se rétablir complètement de se mal de dos, on aura soin d’adopter aussi Pavana Muktasana (voir notre article consacré à cette posture) afin de renforcer la sangle abdominale, ce qui permettra de placer dorénavant le bassin correctement. Enfin, on veillera dans nos activités quotidiennes à garder la colonne bien droite, bien étirée, en adoptant les bonnes positions, ce qui nous donnera peut-être l’air altier d’un hidalgo, mais ce n’est pas très grave !

·         en cas de douleur cervicale
La posture traditionnelle suppose un appui sur le menton. Toutefois, si la région cervicale est sensible en raison d’une arthrose cervicale, d’un torticolis, ou d’un accident du type « coup du lapin », il est possible de ne prendre aucun appui sur le menton, voire même de déposer directement le front au sol afin de dégager totalement la zone cervicale. Certes, une telle liberté prise avec la posture classique limite un peu les bienfaits de celle-ci. Cependant, cet aménagement ne remet pas en cause les bienfaits qui découlent de la mobilisation des muscles dorsaux, lombaires, fessiers, ainsi que des ischio jambiers et du triceps sural.

·         En cas de gêne à l’épaule ou dans le membre supérieur
Si l’on souffre d’une douleur à l’épaule, dans le bras ou l’avant-bras, il est possible de se dispenser de la flexion des coudes et de l’appui sur les mains. Dans ce cas, on garde les bras passifs, allongés au sol, le long du corps. Un tel accommodement limitera le transfert du corps vers l’avant, mais sans contrarier la mobilisation musculaire à l’arrière du tronc et dans les membres inférieurs. Les Anglais recommandent sagement  de « ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain », nous essaierons, tout aussi sagement, de sortir du dilemme « tout ou rien ».

4.       les bienfaits de la posture
Les effets bénéfiques de Shalabhasana sont nombreux et aisément perceptibles. Leur claire compréhension constituera un atout supplémentaire dans la mise en œuvre régulière de cet exercice qui constitue une des bases du Yoga.

·         La régénération du système nerveux
La posture dans sa forme classique conduit à une mobilisation généralisée de la musculature de tout l’arrière du corps, depuis la nuque jusqu’aux talons. Cette contraction musculaire produit un fort afflux de sang frais dans toutes ces régions. Or, l’ensemble de cette zone cervicale, dorsale et lombaire se trouve irriguée par le réseau des nerfs qui émergent de part et d’autre de la moelle épinière. C’est ainsi l’ensemble du système nerveux qui se trouve revitalisé, dans sa double composition sympathique et para sympathique grâce à cette posture.

Shalabhasana constitue ainsi un outil précieux pour éliminer les effets néfastes du stress qui nous affectent plus ou moins : burn out professionnel, troubles digestifs, douleurs dans les mâchoires ou les épaules, attaques de panique, insomnie, spasmophilie, mais aussi troubles mentaux tels que l’irritabilité, l’état dépressif, la nervosité, l’anxiété ou la difficulté à se concentrer. En recourant à cette posture vous n’allez pas perdre votre efficacité au travail, bien au contraire, vous disposerez de plus de ressources intérieures, de ressort, et les personnes de votre entourage pourront, auprès de vous, trouver un pôle de stabilité.

·         Renforcer la musculature de tout l’arrière du corps
Un muscle se développe, s’étoffe à condition d’être sollicité, contracté. Par conséquent, l’adoption régulière de Shalabhasana conduit au renforcement de la musculature de tout l’arrière du corps.  : celle de la région cervicale qui permet d’avoir un bon maintien de la tête, celle du dos, souvent malmenée par une vie sédentaire, mais aussi celle des fessiers, des ischio jambiers et des mollets, qui permet d’avoir une silhouette harmonieuse.

·         la revitalisation des viscères abdominaux
Comme nous l’avons indiqué, le soulèvement, même très limité, du bas du corps engendre un accroissement de la pression intra abdominale. La combinaison de ce phénomène avec le maintien d’une respiration ample, c’est-à-dire dans laquelle le diaphragme se trouve fortement mobilisé, favorise la circulation du sang veineux qui peut stagner dans l’abdomen et le bassin en raison d’un mode de vie trop statique. Ainsi, un sang fortement chargé en oxygène va pouvoir irriguer ces viscères et éviter le vieillissement prématuré de ces régions et leur nécrose.

Le maintien durant toute la posture, tant durant la phase dynamique que statique, d’une respiration correcte est donc primordial. Malheureusement, ceci est trop souvent négligé. Pour contrecarrer notre tendance spontanée à revenir vers la petite respiration superficielle et haletante il est nécessaire de cultiver la vigilance et donc, de garder un esprit concentré durant toute la posture. Bien sûr, les pratiquants débutants feront comme ils le peuvent. Mais, progressivement, au fil des semaines, puis des mois, ils sentiront leur pratique devenir plus profonde, plus consistante et ainsi chacun pourra progresser tout au long de son existence.

·         Effets énergétiques
Cette posture favorise l’activation de la Kundalini, l’énergie ensommeillée mais présente en tout être humain. Son activation sera favorisée par la contraction du périnée qui sera maintenue durant la phase statique de la posture.

 5.       Contre-indications
Nous avons décrit la posture classique accessible à toute personne en parfaite santé et présenté différents aménagements auxquels on peut recourir afin de concilier l’idéal avec nos capacités physiques et mentales du moment.

On perçoit ainsi que Shalabhasana est très largement accessible à condition, bien sûr, de ne pas se comporter comme un « kamikaze » prêt à sauter sur tout obstacle pour se faire mal.

Dans ces circonstances, est-il vraiment utile de rappeler que si vous souffrez d’un lumbago vous vous abstiendrez de soulever les jambes, sauf à vouloir rentrer chez vous à quatre pattes ou sur une civière? Faut-il souligner que si vous êtes au septième mois de votre grossesse vous trouverez sans doute que l’appui sur le ventre est douloureux et donc à proscrire ? Avec un peu de bon sens, et guidé par cet esprit de bienveillance qui doit vous servir constamment de boussole, vous parviendrez à éviter ces quelques écueils sur lesquels vous pourriez vous échouer.

CONCLUSION
Shalabhasana, et sa posture préparatoire, Ardha-Shalabhasana, pourront vous accompagner tout au long de votre vie, et leur pratique régulière vous aidera à prolonger longtemps votre existence. Grâce au calme mental que ces postures favorisent vos actions quotidiennes deviendront plus harmonieuses, plus bénéfiques et vous accumulerez ainsi de précieux mérites. Ainsi Shalabhasana, occupera une place de choix, véritablement irremplaçable, dans votre pratique du Hatha Yoga.

Samavritti Pranayama


Samavritti Pranayama, comme son nom l'indique expressément, constitue une technique de Pranayama.
Rappelons succinctement que le terme de Pranayama désigne la maitrise du souffle grossier (la respiration) et du souffle subtil (l’énergie). Le Pranayama représente ainsi le 4eme stade de l’Ashtanga Yoga, le Yoga en huit étapes, encore appelé Hatha Yoga classique, exposé par Pantanjali dans les Yoga Sutras. Le Pranayama n’est donc abordé qu’après la mise en œuvre des règles éthiques exposées dans les deux premières phases (Yama et Niyama), et après l’apprentissage des postures (asanas).
Samavritti Pranayama fait partie des techniques de Pranayama de niveau moyen. Sa mise en œuvre exige, en effet, l’assimilation préalable de plusieurs techniques élémentaires. Tout d’abord, le pratiquant doit maitriser la respiration en trois parties avec contraction du ventre ; ensuite, il doit être familiarisé avec la mise en œuvre des rétentions du souffle, tant avec les poumons pleins qu’avec les poumons vides; enfin, il doit parvenir à installer un mudra (geste, en sanskrit) bien spécifique.
Samavritti Pranayama prend donc naturellement sa place dans une séance de Yoga après la mise en œuvre d’Anuloma Villoma.
1. Posture requise
Il convient, comme pour toutes les pratiques de Pranayama, de s’installer dans une posture méditative confortable. On veillera tout particulièrement à ce que la colonne vertébrale demeure constamment droite, y compris dans la région cervicale. Pour cela, on veillera à bien repousser le menton en arrière.
2. Asvini Mudra
Samavritti Pranayama nécessite l’installation d’Asvini mudra. Comme tous les mudras, Asvini mudra a pour but d’activer l’énergie et de lui donner une orientation particulière.
Asvini Mudra (le geste de la jument, en sanskrit) porte un tel nom en raison de la façon dont la jument évacue son crottin : elle procède, à la fin, à une succession de contractions et de dilatations du sphincter anal.
Par référence à cette façon de faire, les Yogis dans Asvini Mudra contractent d’abord le sphincter anal, le tire vigoureusement vers le haut, puis le dilatent, et cela plusieurs fois d’affilée.
Dans Samavritti Pranayama, Asvini Mudra est mis en œuvre lors de chaque rétention de souffle, tant à poumons pleins qu’à poumons vides.
3. Descriptif d’un cycle :
          . Inspirez en comptant mentalement 4 temps. L’inspiration s’effectue en trois parties avec maintien de la sangle abdominale.
          . Rétention du souffle avec les poumons pleins durant quatre temps. Installer immédiatement Asvini mudra, 4 fois de suite.
          . Expirez durant quatre temps. Le sphincter anal est relaxé.
          . Rétention du souffle avec les poumons vides durant quatre temps. Installer immédiatement Asvini mudra, 4 fois de suite.
On pourra au départ se familiariser avec la pratique en utilisant le rythme suivant : 4 secondes - 4 secondes - 4 secondes - 4 secondes ; puis on pourra passer à 8 secondes - 8 secondes - 8 secondes - 8 secondes - 8 secondes.
Dans la mesure où la rétention du souffle avec les poumons pleins ne dépasse pas 10 secondes, il n’est pas nécessaire d’installer Jalandhara bandha, ce qui facilitera la mise en œuvre de cette technique.
Afin d’assurer une totale sécurité lors de la réalisation de cet exercice, on rappellera un principe fondamental : les rétentions de souffle ne doivent jamais être forcées et doivent constamment demeurer agréables.
4. Justification d’Asvini mudra
Il devient maintenant plus facile de faire comprendre la nécessité de mettre en œuvre Asvini mudra. Deux raisons, l’une physiologique, l’autre énergétique, expliquent cela.
Dans Samavritti Pranayama la respiration s’effectue, comme dans les autres pratiques de Pranayama, avec maintien de la sangle abdominale sous le nombril. Cette contraction musculaire, combinée à l’abaissement du dôme du diaphragme lors de l’inspiration amène une pression intense dans la cavité abdominale. Cette pression, devenue particulièrement importante lors de la rétention du souffle à poumons pleins, s’exerce mécaniquement vers le bas. Pour prévenir toute descente d’organe il est alors nécessaire d’installer un dispositif de sécurité. Asvini mudra, la contraction anale, joue un tel rôle.
D’un point de vue énergétique, Asvini Mudra assure une fonction comparable à celle d’un transformateur électrique. L’utilisation d’un tel équipement est nécessaire quand vous achetez un train électrique à votre enfant : il faut alors convertir le courant de 220 volts qui sort de la prise électrique murale en un courant de 12 volts adapté au jouet de votre enfant. De façon similaire, la grande quantité de Prana qui est canalisé à l’occasion de Samavritti Pranayama exige une réduction de l’intensité de ce courant afin que l’intégrité des structures énergétiques et physiologiques qui composent notre organisme soit préservée.
6. Les effets positifs
Les bienfaits de Samavritti Pranayama sont à la fois physiologiques et énergétiques.
Les effets physiologiques sont nombreux. Samavritti Pranayama soulage la constipation, évite l’apparition d’hémorroïdes, ainsi que le développement de l’incontinence. Enfin, il favorise l’accouchement de la femme enceinte.
L’effet énergétique de Samavritti Pranayama est puissant. Il découle directement de l’installation d’Asvini mudra. Dans la mesure où le sphincter anal se trouve contracté, on pourrait croire que l’action de Samavritti Pranayama se limite à la stimulation du premier centre d’énergie, Muladhara chakra, situé à la base de la colonne vertébrale. Or, il n’en est rien. En réalité, ce Pranayama régénère tous les centres énergétiques du corps subtil. Il en résulte une revitalisation de tout l’organisme et l’installation d’un état mental particulièrement paisible et épanoui, source de bien-être, mais aussi d’épanouissement spirituel.

5. Mise en œuvre


Pour faciliter la mise en œuvre de Samavritti Pranayama, il est utile de procéder par étapes :
. Tout d’abord, installer la respiration en trois parties avec maintien de la sangle abdominale. On veille à stabiliser l'esprit. Pratiquer deux cycles respiratoires.
. ensuite, installer les rétentions de souffle avec les poumons pleins et les poumons vides. On veillera à bien respecter l'égale durée de chaque phase : inspiration - rétention à plein - expiration - rétention à vide. Pratiquer deux cycles respiratoires.
. enfin, installer Asvini Mudra. Pratiquer deux cycles respiratoires.
Lorsque cette phase d’apprentissage est maitrisée, il est possible de mettre en œuvre directement Samavritti Pranayama sans passer par la décomposition en trois phases que nous venons de recommander.

Huit cycles de Samavritti Pranayama  seront excellents pour une séance quotidienne.
Conclusion
Samavritti Pranayama constitue donc une technique fondamentale qu’on pourra avec grand profit mettre en œuvre tous les jours. Passés les tâtonnements inévitables des premiers moments elle deviendra, sans doute, l’une de vos pratiques de prédilection.
Christian Ledain