BHUJANGASANA


Quand on aborde cette posture, l’énoncé de son simple nom devrait nous inciter à la prudence et au respect.

Le cobra est craint en Inde pour la rapidité de son attaque et la puissance de son poison, souvent mortel. Il est aussi vénéré et pare le cou du grand dieu Shiva, le MahaYogin, autour duquel il s’enroule. Il est ainsi symbole de puissance et de sagesse, symbole d’une puissance éveillée mise au service de la sagesse. Sans la sagesse, le pratiquant imprudent sentira bientôt la puissance destructrice du serpent se déchainer à son encontre et il quittera bien vite la posture en rampant misérablement ! Mais si la puissance qui est éveillée grâce à cette posture est canalisée par l’adepte, celui-ci parviendra alors dans sa vie aux réalisations les plus hautes.

Le dieu Shiva, le Maha Yogin
Les qualités de sagesse dont le pratiquant doit faire preuve dans cette posture sont nombreuses.

Tout d’abord, le respect, l’humilité. L’adepte renoncera ainsi à se « hausser du col » et à chercher à monter à tout prix le plus haut possible. Car l’aspiration à s’élever que l’on manifeste à travers cette posture est avant tout une aspiration intérieure, non une manifestation grossière d’orgueil.

Et puis, il y a la patience : la posture constitue un véritable chemin et il importe d’en suivre les étapes avec méthode et précision et d’en recueillir les différents bienfaits. Ce chemin est un chemin de vie, tout comme, lors d’une promenade en montagne, on prend le temps d’apprécier pleinement chaque point de vue, chaque aspect remarquable du sentier, la qualité de l’air, l’aspect changeant du ciel...Ainsi, lorsque l’on entre dans la posture, on s’ouvre pleinement intérieurement, on se donne la possibilité de vivre tout ce qui va se présenter sur le chemin. En cela, aborder la posture du Cobra, nous renvoie à notre façon d’aborder la vie de façon générale et nous offre la possibilité d’aborder notre existence avec plus de fraîcheur, d’ouverture et de disponibilité : goûter la saveur de chaque instant, prendre le temps d’être et non simplement de faire, ne plus empiler stérilement les actes, comme on empile les assiettes !

Enfin, la non-violence, la bienveillance, l’attention à soi tournée vers la réalisation de soi. Toute brutalité envers soi-même, toute non-écoute de soi, toute absence de prise en compte de ce qui se passe pour soi, toute maltraitance se paierait immanquablement dans cette posture d’une douleur aussi vive et rapide que la morsure du serpent.

Ainsi grâce à la sagesse qu’elle requiert, la posture du Cobra nous introduit à la nature essentielle du Yoga : à travers son corps, à travers les postures, l’adepte célèbre un culte à la puissance transcendante qui est en lui. Le Yoga engage ainsi la totalité de l’être : il constitue une discipline physique, énergétique, mentale et spirituelle qui permet à l’être humain de se développer pleinement et d’atteindre les réalisations les plus hautes dans sa vie. Si le pratiquant hindou rend à travers sa pratique un culte à Shiva, il n’est pas indispensable d’être shivaïte pour bénéficier pleinement des bienfaits du Yoga. Le pratiquant occidental, croyant ou athée, pourra ainsi célébrer à travers cette posture sa nature d’être humain pleinement réalisée.



1.  PRENDRE LA POSTURE

Il s’agit ici de décomposer les différentes phases de la posture en suivant une méthode, c’est-à-dire un enchainement précis et ordonné. Le respect de cette procédure est essentiel pour recueillir pleinement les bienfaits de la posture et s’éviter nombre de désagréments physiques, énergétiques et mentaux. Toutefois, dans le respect des principes énoncés ci-dessous, il sera possible d’exercer une grande liberté. Chacun, pourra ainsi, selon ses dispositions, moduler à loisir sa pratique en laissant la cambrure de l’arrière du corps se propager plus ou moins, en contractant plus ou moins chaque ensemble musculaire, ou bien en demeurant plus ou moins longtemps dans la posture.

11. phase préparatoire

Les extrémités des majeurs sont à la hauteur des épaules.
Les bras sont plaqués contre les flancs.
La nuque est étirée.

La personne est allongée à plat ventre, les jambes étendues, les deux pieds plaqués l’un contre l’autre.

Le front est posé au sol afin d’étirer la région cervicale et de dégager ainsi les filets nerveux qui émergent de chaque côté de la colonne vertébrale. Cet allongement préalable de la musculature cervicale constitue une nécessité.

Les mains sont posées au sol, de part et d’autre du haut du tronc. L’extrémité des doigts se place exactement à la hauteur des épaules. Les avant-bras ne reposent ainsi pas au sol. Les coudes sont plaqués contre les flancs. Ce placement particulier est important car il va garantir un appui correct et une mobilisation adéquate de la musculature dorsale lors de l’élévation du tronc.

Les mollets sont détendus et vont le demeurer tout le temps de la posture.



12. le soulèvement progressif du tronc
Les muscles du visage sont détendus.
La musculature de la nuque, du dos et des fessiers est sollicitée.
Aucun appui sur les mains : les épaules sont abaissées.
La posture du cobra va installer progressivement une cambrure de la colonne vertébrale et ce dans un mouvement qui se propage du haut vers le bas. On va ainsi creuser d’abord la région cervicale ; puis, si cela est possible, on permettra à cette cambrure de descendre dans la région dorsale, pour se propager éventuellement dans la région lombaire. Tout cela, bien sûr, est actualisé en fonction des aptitudes et des éventuelles fragilités de la personne.

La mobilisation du corps se fait à travers un mouvement lent, une progression régulière et fluide. Il faut par conséquent se garder de tout mouvement brusque, accompli sans prise de conscience de ce qui se passe dans notre corps et dans notre esprit. Il ne s’agit pas d’aller le plus haut possible, le plus vite possible, comme aux Jeux Olympiques ! Il ne s’agit pas de se dépasser, mais de se trouver et de s’accomplir à travers la posture qui n’est qu’un outil.

Voici les étapes à respecter afin de procéder de façon sécurisée :

Allongé à plat ventre, on commence par pousser le nez vers l’avant, le plus loin possible. On installe ainsi une flexion au niveau des premières vertèbres cervicales. Puis, ce mouvement se prolonge de façon naturelle par une poussée lente du menton vers l’avant, ce qui propage la cambrure jusque dans les dernières vertèbres cervicales.

Les mâchoires desserrées, on pointe le nez vers le plafond et on soulève lentement la poitrine. La mobilisation, pour être juste, doit être régulière et s’effectuer vertèbre après vertèbre. Le soulèvement de la poitrine se fait presque exclusivement par la mobilisation des muscles dorsaux, à l’exclusion de tout appui sur les bras.

Les personnes dont la musculature dorsale est suffisamment étoffée et dont la colonne vertébrale n’a pas été malmenée pourront poursuivre la mise en place de la posture. Les autres auront la sagesse de demeurer dans l’attitude qui est confortable pour eux.

13. le redressement complet du tronc

Il est possible de poursuivre lentement le soulèvement du tronc. La cambrure dorsale pourra ainsi se propager jusqu’au bas du dos. On veiller alors à contracter fermement les muscles fessiers afin de protéger la région lombaire. On parvient ainsi à une contraction généralisée de la musculature de l’arrière du corps, de la région cervicale jusqu’aux fessiers.
Attention ! cette 2e phase exige une région lombaire non endommagée.
Le tronc se redresse dans la limite des possibilités. Le pubis reste au sol.
Les muscles du dos sont relâchés, les épaules abaissées, les bras fléchis.

Il est possible de décoller le nombril du sol. Par contre, on veillera absolument à conserver le pubis et les jambes plaqués au sol.

Dans cette attitude les coudes demeurent fléchis. L’appui pris sur les mains est modéré, minime. Il ne s’agit surtout pas de compenser la faiblesse relative de la musculature dorsale par une poussée exercée sur les bras.

Si vous pouviez contempler alors votre dos, vous le verriez changer de couleur et rosir fortement du fait d’un afflux sanguin intense consécutif à la mobilisation de la musculature dorsale.

De même, si vous pouviez alors tapoter votre dos, il rendrait un son particulier, mat, comme un instrument de musique à percussion, un tabla, dont on aurait suffisamment tendu la peau pour pouvoir en jouer.

Il est important d’être très attentif lors de cette phase dynamique de la posture. Voici quelques repères qui vous permettront de vérifier à chaque instant que votre attitude corporelle est correcte :

. à mesure que le corps se redresse, la musculature de l’arrière du corps se contracte, et cette contraction se propage de la nuque vers les fessiers ;

. à mesure que la flexion se propage les muscles précédemment contractés le demeurent ;

. les muscles du visage sont détendus et on prend le temps d’apprécier le relâchement successif du front, des sourcils, des mâchoires et de la langue. La bouche peut ainsi être légèrement entre-ouverte. Une sensation d’agréable repos est ainsi expérimentée dans tout le visage.

. la face antérieure du corps est étirée à partir du bas du visage (zone correspondant à la première vertèbre cervicale). Cet étirement intense est ainsi perceptible dans la région du cou, de la poitrine et jusque dans l’abdomen. De façon logique, cette sensation d’étirement constitue l’exact symétrique de la contraction éprouvée à l’arrière du corps.

. les épaules sont abaissées et vos bras sont détendus. A aucun moment vous ne devez vous retrouver les bras tendus et les épaules soulevées.

. à tout moment la mobilisation musculaire est agréable. Toute douleur serait l’indication d’une maltraitance à l’égard de soi, d’une pratique brutale causée, la plupart du temps, par une installation trop rapide dans la posture. On ne prend le temps de rien, on se coupe de ses sensations et finalement on se fait mal sans même s’en être rendu compte. Si une telle mésaventure devait toutefois survenir, n’en soyez pas affecté outre mesure. La bonne attitude consisterait alors à générer plus d’attention bienveillante vis-à-vis de soi et à décider de mieux percevoir et respecter ses limites.

La première phase de la posture a consisté à redresser le tronc. Nous avons souligné que selon les capacités de chacun, ce soulèvement doit s’arrêter plus ou moins tôt.

Commence alors la seconde phase de la posture : la phase statique.

2. DEMEURER IMMOBILE DANS LA POSTURE

Dans la phase statique, le tronc qui a été précédemment redressé ne bouge plus. Un repère utile consistera à veiller à ne pas faire redescendre la tête.

Une modification importante, mais non apparente, survient alors : la mobilisation musculaire change profondément. Cinq changements sont ainsi apportés :

. Les muscles des bras qui étaient jusqu’à présent détendus, entrent en action, sont sollicités; mais on veille à toujours garder les épaules abaissées.

. Dans le même temps, les muscles de l’arrière du corps qui étaient contractés sont progressivement relâchés. Cette détente des muscles fessiers et dorsaux doit se faire progressivement afin de garantir la sécurité du dos. Si l’on perçoit la moindre faiblesse, la moindre fragilité, on contractera aussitôt à nouveau ces muscles de l’arrière du corps.

Comme on le perçoit, la cambrure qui a été installée lors de la phase dynamique est ainsi maintenue. Mais ce maintien est désormais assuré par la mobilisation des bras et non plus par la sollicitation des muscles de l’arrière du corps.

3. APPROFONDIR LA POSTURE

Il est possible, afin que la posture produise pleinement ses effets énergétiques, d’ajouter alors quelques modifications à la posture :

. Contraction du périnée

Le périnée est contracté fermement et de façon continue (mula bandha). Cette mobilisation musculaire est déterminante et il importe de la solliciter avec la plus grande précaution. Maintenir cette contraction durant une minute est excellent. Par contre, il est impératif de ne pas demeurer plus longtemps le périnée contracté sans les recommandations d’un enseignant averti. En effet, des désordres énergétiques pourraient survenir d’une contraction prolongée.

. le regard est dirigé vers le haut, orienté vers le point entre les sourcils, ce qui amène à loucher (Shambavi  Drishti).

. la langue est renversée en arrière, comme si on voulait toucher la glotte avec l’extrémité de la langue (khéchari mudra).



4. LES BIENFAITS DE LA POSTURE


En permettant un redressement de la colonne vertébrale, un bon maintien du dos et la dissipation de la graisse superflue sur l’abdomen, cette posture présente indiscutablement des effets esthétiques non négligeables.

Mais, outre cela, la posture du Cobra dispense des bienfaits physiologiques tellement nombreux qu’elle constitue assurément l’une des postures les plus importantes du Yoga.

. stimulation de la cavité abdominale

Dans la posture du Cobra, la succession de la compression, puis de l’étirement, de l’abdomen favorise le bon fonctionnement du contenu de la cavité abdominale. Tous les viscères abdominaux sont ainsi soulagés et stimulés. Cet effet bénéfique est particulièrement accentué si la respiration abdominale est maintenue lente, profonde et puissante.

Les composants du système digestif (estomac, foie, vésicule biliaire, intestin grêle, gros intestin) sont comprimés et revitalisés. Le foie est ainsi rapidement décongestionné et la vésicule biliaire, excessivement remplie, se trouve vidée.

La nourriture est mieux assimilée et les risques de constipation dissipés.

Le fonctionnement du pancréas et de la rate sont eux aussi favorisés. Bhujangasna est ainsi recommandé en cas de diabète.

Les troubles menstruels sont apaisés. Le bon fonctionnement des ovaires se trouve favorisé, contribuant ainsi à dissiper certaines formes de dysménorrhée et d’aménorrhée.

. régénérescence du système nerveux

Grâce à la forte mobilisation des muscles dorsaux, la moelle épinière et les chaines de ganglions sympathiques qui longent la colonne reçoivent un sang frais, fortement chargé d’oxygène, ce qui contribue au bon fonctionnement du système nerveux.

. revitalisation du système endocrinien

Les glandes endocrines assurent la sécrétion d’hormones, lesquelles régulent à distance le fonctionnement d’autres organes. Grâce à l’alternance de la contraction, puis du relâchement de la musculature dorsale, la posture du Cobra régule de façon très nette le fonctionnement des glandes surrénales qui secrètent notamment l’adrénaline lorsque la personne se trouve en situation de stress. Par ailleurs, grâce à l’étirement du cou, Bhujangasana contribue aussi à harmoniser le fonctionnement de la glande tyroïde.

. assouplissement de la Colonne vertébrale et renforcement de l’arrière du corps

Bhujangasana favorise la souplesse de la colonne vertébrale. Cette posture corrige la cyphose dorsale (dos voûté) consécutive bien souvent à l’adoption d’une mauvaise position du tronc. Les longues heures passées au bureau à consulter des papiers, ou à travailler devant un écran d’ordinateur, rendront l’adoption de cette posture encore plus nécessaire.

La musculature de tout l’arrière du corps se trouve renforcée. Ainsi, la posture prise modérément peut aider à soulager instantanément un lumbago, à condition que la cambrure du dos ne soit pas forcée et que la musculature demeure fortement et continument contractée (voir précautions).

5. PRECAUTIONS ET CONTRE-INDICATIONS

Toute personne qui, par ignorance, violence ou orgueil, aborderait cette posture de façon inconsidérée irait immanquablement au-devant de graves dangers, tout comme une personne étourdie qui marcherait sur la queue d’un cobra s’exposerait à une morsure fulgurante et mortelle.

Il est donc essentiel de renoncer à se lancer dans une vaine acrobatie, et à vouloir « monter plus haut que les autres ». Laissez le temps à la posture de vous dispenser ses bienfaits et permettez à votre esprit de se poser et de se concentrer.

De façon générale, cette posture ne présente pas de danger dès lors que le déroulement précis de la procédure est respecté et que l’on ne fait preuve d’aucune brusquerie. La pratique du Yoga ne s’adresse qu’aux personnes qui ont renoncé à la violence : ahimsa constitue le premier principe de l’Ashtanga Yoga.

Les personnes dont la colonne vertébrale est, ou a été endommagée, procéderont avec une particulière circonspection. Si la région cervicale est fragile en raison, par exemple, de l’apparition d’arthrose, on veillera à ne pas cambrer cette zone. La personne pourra néanmoins redresser son tronc et adopter l’attitude particulière du serpent dont la photo est insérée en ce début d’article.

Si c’est la région lombaire qui doit être particulièrement protégée, soit en raison d’une sciatique, soit d’une soudure de vertèbres, il sera possible d’adopter la posture à condition de ne pas faire descendre la cambrure dans le bas du dos et de ne pas relâcher la musculature dorsale et lombaire . De façon générale, tant que le dos ne sera pas suffisamment fortifié et que les disques intervertébraux endommagés ne seront pas rétablis, on s’abstiendra de relâcher la musculature dorsale ( 2e me phase de la posture).

Ces précautions étant prises, le nombre des contre-indications pour cette posture est limité.

Les femmes enceintes s’abstiendront ainsi de prendre Bhujangasana en raison de la compression de l’abdomen au sol.

Par ailleurs, en cas de spondylolisthesis, l’adoption de cette posture est proscrite puisque la cambrure de la colonne vertébrale pourrait accentuer le glissement d’une vertèbre par rapport à une autre.

Christian LEDAIN

UTKATASANA




UTKATASANA


En occident, cette posture reçoit habituellement deux appellations différentes.   Chacune d’elle correspond à un certain niveau de profondeur de la pratique et de compréhension de la nature de l’être humain. En ce sens, ces deux appellations sont tout à fait exactes et complémentaires.

La première dénomination met l’accent sur l’aspect formel, l’apparence physique. La posture est ainsi appelée « la chaise yogique » car celui qui l’adopte donne extérieurement l’impression d’être assis sur une chaise imaginaire.

L’autre appellation met en exergue la dimension énergétique de la posture. Elle correspond mieux à la traduction du terme sanskrit « utkata »  qui signifie « sauvage »,  « furieux ». Utkatasana est ainsi la posture sauvage ou furieuse. Cette dernière dénomination amène notre attention sur le caractère indompté, déchainé de l’énergie qui est ainsi éveillée par l’intermédiaire de cette posture. Or, il ne s’agit pas pour le pratiquant de donner libre cours à des pulsions non maîtrisées. La force physique développée et l’énergie activée doivent être transmutées, mises au service des finalités les plus élevées que puisse atteindre l’être humain.  Voilà pourquoi les Yogis ne cessent de développer en eux les états émotionnels d’altruisme et d’amour et d’approfondir leur connaissance des textes sacrés afin d’atteindre par leur pratique du Yoga la réalisation complète de l’être humain.
Dans notre présentation de cette posture nous mettrons l’accent sur ses deux dimensions : physique et énergétique.
1. Prise de la posture
La personne est debout, les deux pieds plaqués l’un contre l’autre. Le bassin est basculé et donc les muscles fessiers et abdominaux sont fortement contractés. Grâce à l’antéversion du bassin, les pieds sont fermement enfoncés dans le sol, ce qui procure à la personne une sensation d’enracinement, de stabilité physique condition préalable à l’installation de la stabilité mentale.
Sur une inspiration, la personne élève les mains, et tend les bras. Durant cette élévation, la personne demeure concentrée au niveau du nombril  et veille ainsi à ne pas transférer son centre de gravité vers le haut.

première phase

Lorsque les bras sont tendus, les paumes plaquées l’une contre l’autre, la personne veille à bien abaisser les épaules afin de mobiliser fermement la musculature du haut de son dos, entre les omoplates. Le menton est repoussé en arrière. Ainsi tout l’arrière du corps est vigoureusement aplati, ce qui engendre une mobilisation musculaire intense.
La personne fléchit alors les genoux en veillant à garder les talons au sol et à ne pas creuser la région lombaire, ni à incliner le tronc vers l’avant.
Attention, il ne faudrait pas croire, comme pourrait le laisser penser le nom « chaise yogique », que la posture soit conservée de façon molle, passive.  L’engagement  physique doit, en effet, être intense afin que la posture puisse produire pleinement ses bienfaits physiques et énergétiques.
Pour atteindre ce résultat, l’adepte fait comme s’il voulait ficher la pointe de son coccyx dans le sol, tout en repoussant le plafond avec le sommet du crâne. C’est la conjonction de cette double force, exercée concomitamment vers le haut et vers le bas, qui assure l’éveil de l’énergie. 

position finale


Cet investissement s’accompagne de la contraction de mula bandha durant toute la phase statique.

2. Caractéristiques générales
Il n’existe pas de contre-indication pour cette posture. Par ailleurs, sa simplicité technique la rend très largement accessible, ce qui renforce sa dimension universelle.
L’absence de difficulté va favoriser la concentration car la personne va ainsi prendre le temps « d’entrer dans la posture » et de canaliser le flux de ses pensées.
Enfin, les personnes font l’expérience de leur grande liberté en modulant à loisir l’intensité de leur pratique.

3. Bienfaits
Les pieds et les jambes sont fortement sollicités et donc vigoureusement tonifiés. Ceci contribue à assurer une meilleure stabilité, un meilleur équilibre de la personne.
L’intense contraction des muscles des mollets et des cuisses (quadriceps) provoque une compression des veines profondes des jambes, ce qui favorise le retour de la circulation veineuse vers le cœur. La posture prévient ainsi efficacement l’apparition de varices. Cette posture est donc particulièrement recommandée aux personnes sédentaires ou qui piétinent beaucoup dans la journée.
Toute la musculature du dos, ainsi que la sangle abdominale sont renforcées.Les micro contractures musculaires du dos se trouvent facilement dissoutes.Les courbes de la colonne vertébrale sont aussi atténuées,  ce qui contribue à corriger les déviations par rapport à la verticalité (hyperlordose lombaire et cervicale, ainsi que cyphose dorsale). Cette posture contribue ainsi fortement à corriger les effets néfastes des attitudes corporelles incorrectes qu’adoptent trop souvent les Occidentaux. Devenus sédentaires, nous passons de longues heures au bureau, le dos appuyé contre un dossier qui lui ôte sa musculature ; ou bien, nous gardons le tronc incliné vers un écran d’ordinateur, ce qui accentue sa voussure ; enfin, rentrés chez nous, nous nous effondrons sur un sofa moelleux qui affaiblit encore notre dos. Rien d’étonnant, dans ces conditions, à ce que le mal du dos soit devenu le mal du siècle !

4. Maintenir la respiration profonde
Pendant la tenue de cette posture, on veille à ne pas se couper de la respiration en trois parties. La conjonction de cette respiration correcte et du maintien ferme de la sangle abdominale crée une sensation particulière : une forge semble se mettre en route à l’intérieur de l’abdomen. Et il importe qu’un soufflet puissant alimente constamment cette forge afin que le feu se diffuse largement dans tout l’organisme.
5. Durée de la pratique
La tenue de cette posture durant une minute apportera déjà un grand soulagement. Maintenant, l’adepte ne s’empêchera pas, après avoir éventuellement marqué une petite pause, de revenir dans la posture plusieurs fois d’affilée. Garder ainsi la posture 3 ou 4 minutes sera excellent et redynamisera complètement l’organisme.


Conclusion
Le Yoga vise à la réalisation totale du potentiel de l’être humain. Comme nous l’avons indiqué, la bonne santé physique que procure cette posture et l’énergie qu’elle éveille en chacun de nous doivent nous servir à adopter des comportements justes, réaliser des actions qui ont vraiment un sens et dont nous pouvons vraiment être fiers. La pratique du Yoga contribue à nous élever, à nous permettre de devenir plus humain, et pas seulement à être plus productif ou plus performant.


Trataka

Trataka
Trataka fait partie des Sat karman exposées  dans le Hatha Yoga Pradipika, c’est-à-dire des six actions préalables à la pratique du Pranayama. Ces actions constituent « des moyens de purifier le réceptacle physique » (HYP, II, 23).
Cette pratique est décrite avec une extrême concision et une grande sobriété: « Fixer le regard immobile,  l’esprit calme et concentré, sur un objet très menu, jusqu’à ce que les larmes jaillissent. Ceci est appelé trataka par les âchâryas.» (HYP, II, 31)
« Guérissant les maladies oculaires, dispersant la somnolence, trataka doit être gardé secret à tout prix, comme on ferait d’un coffret plein d’or.» (HYP, II, 32)
En réalité, les Yogis ne sont pas animés par l’égoïsme et l’avidité, mais cherchent à se libérer de la souffrance et à aider les autres êtres. Dans la mesure où cette pratique est très puissante, il s’agit plutôt de mettre ici en garde des pratiquants impétueux contre une expérimentation débridée.
Le regard doit être placé, maintenu et quasiment rivé sur un point minuscule. La pointe de la flamme d’une bougie placée un mètre devant soi était autrefois une recommandation bien souvent donnée. Mais vous n’avez peut-être pas la chance de vivre dans une grotte ou bien une hutte, et dans ce cas, la pointe d’un stylo Bic fera très bien l’affaire, à moins que vous ne préfériez fixer votre regard sur une poussière collée au mur ! Mais si tout est désespérément propre chez vous, vous pourrez tendre le bras droit, l’index vertical et fixer la partie supérieure de l’ongle. Le risque de distraction est cependant important dans ce cas. Aussi peut-il être utile d’accroître sa concentration en fixant un point dans l’espace une cinquantaine de centimètres devant soi.  
Quand le regard est ainsi placé, on est sensible à ce qui se passe à l’arrière des yeux, au niveau des muscles oculaires.
Il est préférable que le regard soit gardé à l’horizontale, voire légèrement incliné vers le bas. Mais on veillera à ne pas piquer du nez.
Le regard est fixe, mais l’esprit est calme, détendu ; il ne s’attache ni à ce qui est vu, ni au fait même de voir.
Aucune indication temporelle n’est donnée : la pratique est accomplie jusqu’à ce que les larmes viennent aux yeux. Alors, on clôt les paupières. Bien sûr, il peut être utile de s’aider et de se donner une durée d'une minute à titre de repère . Mais, la limite à ne pas dépasser, c’est l’apparition des larmes.
On veille à ne pas ciller des paupières, ni à cligner des yeux. Toutefois, le moins possible. Cet accommodement avec la pratique est nécessaire et il est essentiel de développer constamment cette tournure d’esprit bienveillante à l’égard de soi-même.
On s’applique à garder le corps droit et immobile, mais non pour se rigidifier telle une statue. Il s’agit plutôt de se donner la permission d’expérimenter la stabilité reposée du corps afin d’observer ce qui se passe alors en notre esprit et de lui permettre de se poser progressivement.